jeudi 10 novembre 2016

Bons Points

Quand on lit à droite et à gauche les divers mouvements "éducationnels", la question des punitions / sanctions / récompenses se pose généralement assez vite.

Voilà l'état de mes réflexions à ce sujet... et notamment, pourquoi et comment je donne des Bons Points (notez les majuscules) aux enfants dans le cadre de l'IEF.

Vous connaissez le proverbe : 
Avant, j'avais des principes... maintenant, j'ai des enfants
Ou la version familiale : 
"il faut avoir des principes pour s'appuyer dessus... jusqu'à ce qu'ils cassent" 

Avant, donc, dans un monde idéal, mes enfants auraient travaillé pour le plaisir d'apprendre de nouvelles choses ou d'approfondir leurs connaissances et ils auraient persévéré dans les difficultés.
Ils auraient rangé leurs affaires pour le plaisir d'avoir une belle chambre bien rangée, ... etc (je continue ? )

Ca, c'était avant. Dans mes rêves les plus fous (ceux que tous les pas-encore-parents ont fait un jour)

Maintenant, j'ai des enfants. Des vrais, pas des rêves. Qui sautent, qui chantent, qui font du bruit, du bazar, qui sont parfois difficiles à comprendre, ... (et que j'aime très fort :-) ).

En matière d'éducation, il me semble assez pertinent de les laisser assumer les conséquences de leurs choix et de leurs actes (dans la mesure du possible, je ne vais pas les laisser se jeter sous les rues d'une voiture pour leur apprendre que c'est dangereux), quitte à penser (voire... dire) : "Je t'avais prévenu !" (ah tiens donc, on glisse dans l'escalier quand on le dévale en chaussettes ? C'est bizarre... Peut-être qu'avec des chaussons aux pieds ça serait moins risqué ?).

Ca marche plutôt bien... en général, mais pas toujours !
Car ces petits anges ne voient pas toujours l'intérêt de jouer dans une chambre rangée, plutôt que d'aller extraire les playmobils du fond de la caisse des déguisements ou d'avoir à organiser une expédition de spéléologie pour retrouver le doudou chéri dans le tiroir des Legos.

Vision d'horreur dans notre salle d'activités...
dont Serpolet n'est pas le seul responsable !
Il n'y a plus de place sur la table ? pas de problème, continuons à colorier par terre. 

Les trottinettes ont passé la nuit dehors ? Elles vont s'abîmer... sûrement, mais ça ne se verra pas après une seule nuit.

Les doudous ont disparu à l'heure du coucher ? Ah, ça, c'est un problème... 

Mon constat est le suivant : si les enfants comprennent assez vite où est leur intérêt personnel et immédiat, ce qui relève du Bien Commun (dont, rappelons-le, les parents sont les garants à la maison) ou d'un plus long terme leur est parfois plus difficile à mettre en oeuvre.
Quoi de plus normal ? les enfants vivent à 100% dans l'instant présent (le pourcentage diminuant avec l'âge)...
Mais alors, comment faire, pour que la vie à la maison soit agréable pour tous ? ou pour obtenir que nos têtes blondes (plutôt brunes chez nous !) travaillent pour un futur très lointain (à leur échelle) ?

Chez nous, la question se pose à la fois pour la vie de la maison et dans le cadre de l'IEF.
En ce qui concerne le rangement, les niveaux sonores acceptables, ... nous en restons aux "conséquences désagréables", avec quelques principes de base : la chambre doit être rangée avant le diner, on parle calmement pendant les repas, ... Les sanctions sont directement liées à l'objet de la règle.

Mais, dans le cadre de l'IEF, comment encourager un enfant dans un apprentissage que nous pensons bon et nécessaire pour lui ? 

Le problème s'est posé chez nous de façon forte : Amaryllis refusait absolument de lire (depuis un an environ, par pure coïncidence, depuis la naissance de Serpolet). Elle avait atteint le point où toutes les compétences sont acquises, mais où il faut s'entraîner régulièrement pour que lire devienne un plaisir. Pendant un an, j'ai à peu près tout essayé : lui proposer des supports variés, ne rien proposer, l'encourager avec des raisins secs (mais elle est incorruptible...!).

En septembre, avec le début de la nouvelle année et surtout de l'instruction obligatoire, j'ai pris le taureau par les cornes et décidé que, tous les matins, elle lirait 15 minutes. Je dis bien, 15 minutes de lecture efficace, pas 15 minutes à se plaindre entre chaque syllabe.

Le premier mois (septembre) a été assez difficile, ce qui avait des conséquences négatives pour Pervenche : mauvaise ambiance dans la salle de classe, encouragement à la rébellion (ou au moins à "traîner les pieds"), et également une moindre attention à elle (puisque toute mon énergie était tournée vers sa sœur).



Comment rétablir l'ordre et la joie ? 
J'ai donc proposé le système des Bons Points, qui récompensent, non pas les compétences, mais l'application au travail (le sourire et le calme).
Cela permet de les encourager lors des apprentissages à long terme (par exemple, et j'y reviendrai plus en détail, l'entraînement à la lecture pour Amaryllis... )

A la fin de la séance, je leur demande ce qu'elles pensent de leur état d'esprit de la matinée (et je leur donne mon avis ; bien que globalement, elles reconnaissent quand ça a été profitable... ou non) (je fais cela discrètement lorsque l'une des deux a mérité un BP et pas l'autre...).
Pervenche était encouragée à s'appliquer malgré les perturbations de sa sœur, et Amaryllis un peu plus motivée pour lire.

Concrètement :
Dix bons points donnent droit à un petit cadeau (une petite vie de saints à choisir dans ma réserve, jusqu'à épuisement du stock). Elles peuvent également renoncer au Bon Point et obtenir 3 raisins secs ou 1 abricot sec (ben oui, vous avez vu la taille des abricots par rapport à celle des raisins ? ;-) ).
Ils sont symbolisés par des petits ronds découpés dans du carton doré. (photo à venir...)

Les Bons Points ont été souvent évoqués en septembre, un peu moins en octobre, et pas du tout en novembre (pour l'instant ...) : ils ont atteint leur but.
Car je vois ce système comme un moyen provisoire et non systématique : l'objectif étant tout de même de leur apprendre à travailler pour l'amour du travail bien fait, et en faisant confiance aux parents qui leur indiquent les apprentissages nécessaires...!

22 commentaires:

  1. Intéressant ! Petite question : quand tu dis qu'ils n'ont pas été évoqués en novembre ça signifie que tu n'en as pas donné, qu'il n'y a pas eu besoin de faire de bilan post séance de travail,...?

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je n'en ai pas donné, elles n'en ont pas réclamé (donc pas eu besoin de faire de bilan, quand ça s'est bien passé, je dis un petit mot, comme "oh comme c'était agréable de travailler aujourd'hui")

      Supprimer
    2. (Je suis un peu lente de la comprenette mais...) ca signifie qu'en fin de séance ce n'est pas toi qui disais "faisons un bilan" mais elles qui réclamaient "maman puis-je avoir un bon point?" ?

      Supprimer
    3. Les deux, mon capitaine ! (si "j'oubliais", elles me le réclamaient : est-ce que j'ai bien travaillé pour avoir un BP ? et je demandais : "que penses-tu de ton travail ?")

      Supprimer
  2. J'aime beaucoup cette manière de voir les choses. C'est une belle manière de sortir de l'impasse dans le respect de tous.
    Merci pour la photo vision d'horreur, non tout n'est pas tout rose tout le temps !
    Servane

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci de ton gentil petit mot !
      Oui, les blogs chaussent souvent leurs lunettes roses, mais le quotidien n'est pas toujours ainsi...

      Supprimer
    2. Ah oui moi aussi j'ai adoré la photo ! Mais c'est curieux dessus la pièce me semble plus grande que dans mon souvenir... comme quoi au fond le bazar a du bon 😋

      Supprimer
    3. J'étais assez reculée pour prendre la photo, dans mon souvenir...

      Supprimer
  3. Merci pour cet article qui me déculpabilise pour le coup pour mes visions d'horreur que je vis souvent à la maison. Ça fait du bien de savoir qu'effectivement on est pas seule à vivre cela, en somme une famille normal quoi :-))
    Bonne continuation pour ton blog que j'ai plaisir à lire.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci ! Je crois que je vais partager encore plus sur les moments difficiles alors :-)
      Oui c'est réconfortant de savoir que les orages sont aussi chez les autres...

      Supprimer
  4. Bonjour,
    J'aime beaucoup l'idée des bons points et encore l'idée de renoncer à celui en troquant contre 1 abricot sec ou 3 raisins secs .
    La vision d'horreur comme tu le décris si bien me rappelle la chambre (ou le salon de classe) de Melle J . Je vais voir si on arrive à améliorer cela .
    Maritne42

    RépondreSupprimer
  5. J'utilise des gommettes pour récompenser le travail et le comportement.Mathilde les colle sur son cahier. Je dissocie car il peut arriver que le travail soit nickel mais que l'attitude laisse un peu à désirer. Autant te dire que ce sont les gommettes de comportement qui sont le plus prisées car plus difficiles à obtenir!
    Sandrine

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Il me parait aussi important de dissocier travail et attitude.
      Je récompense seulement l'attitude (bon esprit, persévérance dans les difficultés), parce qu'Amaryllis a de grandes facilités dans le travail, donc elle n'a pas besoin d'encouragements particuliers pour cela. On verra ce dont Pervenche et Serpolet ont besoin !

      Supprimer
  6. J'ai acheté au printemps un arbre avec 12 branches correspondant aux mois de l'année et chacun orné de feuilles représentant les jours. Les couchers étaient devenus difficiles à gérer avec ma mini. Ca finissait vite en trampoline sur le lit. Je lui ai proposé de colorier chaque soir une feuille en fonction de la manière dont se passait le coucher : vert foncé si c'était top, vert clair pour moyen et rouge pour bof. Très vite, elle a prix ses marques et fait du coucher un moment calme qui ne s'éternisait plus. Pendant 3 mois on s'est tenu au rituel du coloriage et cet été, elle n'y a plus pensé. Un rituel du coucher était installé, on avait passé un cap juste grâce à une feuille colorié chaque soir. Ce fut le médiateur qu'il nous fallait.
    Je ne sais pas si je devrais de nouveau avoir besoin d'un médiateur de ce genre mais ça nous convient. Je comprends donc tellement l'intérêt de tes bons points...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'est une jolie idée ! je note, au cas où.
      Oui comme tu le dis bien, on a finalement souvent besoin de médiateur pour passer un cap difficile...

      Supprimer
  7. Je suis assez d'accord avec toi. Je pense aussi que parfois, avec Montessori, on oublie un peu ... le péché originel. Dans l'idéal, oui, les enfants apprennent et sont heureux de travailler et de reprendre un travail jusqu'à épuisement de l'intérêt... mais cela n'arrive pas toujours...
    Ici on utilise le petit plateau avec des étiquettes pour savoir quel est le programme de la séance, mais pas de bon point, je n'en ai pas envie, encore. On verra plus tard !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je n'en avais pas très envie, mais il a bien fallu y passer ;-)

      Oui, on oublie trop souvent le péché originel ! Je suis contente que tu partages mon avis à ce sujet :-)

      Supprimer
    2. Je ne sais pas si c'est avec Lontessori qu'on l'oublie un peu ce fameux péché originel ou si c'est dans tous les oy rages sur la bienveillance ou parentalité positive. C'est d'ailleurs un vrai problème pour moi. J'aimerais bien trouvé un vrai bon livre qui ne manque pas d'en parler... (Peut être ceux ´dHaim Ginott dont parlait Gwen)
      Servane

      Supprimer
    3. Servane, oui à mon avis c'est une tendance dans "l'éducation bienveillante" en générale
      (une tendance ! je n'ai pas dit que tous étaient ainsi ;-) )

      Supprimer
  8. J'aime bcp la photo de la salle en désordre! C'est ça la vraie vie!
    Très intéressant cette histoire de bons points.
    Je vais creuser ( en ce moment on ne sait plus quoi faire pour éviter les crises et pleurs continuels de petitf la moindre frustration)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Est-ce que tu as pensé au vermifuge ? c'est de saison, et ça peut expliquer les crises et l'irritabilité...

      Supprimer