Souvenez-vous, Amaryllis a été très, très tôt
passionnée par les lettres. Ce fut une première étape courte mais très intense (un mois, dans mon souvenir) : je me souviens encore de la tension qui régnait dans le salon lorsqu'elle y travaillait. Pas une tension négative de mauvaise ambiance, une tension qui fait avancer (courir même) : elle était engagée corps et esprit dans ce processus et cela se ressentait physiquement (
si si, je vous assure !). Je sortais épuisée de nos courtes (une demi-heure) séances !
Après un temps de latence (6 mois), j'avais repris le "je devine" et les lettres rugueuses. Était venue ensuite la joie du
premier mot.
Nous avons déroulé la
progression Montessori : écriture spontanée, dictées muettes, pochettes des phonèmes, pour en arriver à un autre grand moment :
l'explosion de la lecture .
Elle avait connu la joie d'écrire, d'envoyer ses premières lettres (numériques).
Au printemps 2015, un peu avant ses 5 ans,
on pouvait dire qu'elle savait lire : elle lisait tous les phonèmes sans problèmes, était capable de déchiffrer un mot inconnu. Donc nous pensions, bien naïvement, qu'elle n'allait pas tarder à lire avec plaisir.
Erreur, grande erreur. Amaryllis est très volontaire, comprend très vite, ... mais n'aime pas du tout "cent fois sur le métier remettre son ouvrage". La répétition l'ennuie terriblement. Sauf que, pour s'améliorer en lecture, il n'y a pas d'autre solution que de lire souvent ! Plus on lit, mieux on lit et avec plus de plaisir.
Un autre frein est venu s'ajouter à celui-ci : la naissance de Serpolet. Si mignon soit-il, ce petit frère prend de la place, occupe papa et maman... (et cela a dû également lui rappeler les premiers mois compliqués après la naissance de Pervenche). Donc plus question de faire des choses de grand (sauf le vélo, faut pas pousser quand même ;-) !). Surtout ne plus aborder la préparation à la Première Communion. Ne pas évoquer le mot "lecture". Se sauver dans l'escalier à l'heure du départ au caté. Même ses chers cours de danse étaient compliqués (ah oui, Pervenche et Serpolet, eux, restent avec Maman...).
Petit à petit, elle a appris à aimer son petit frère, à jouer même avec lui. Elle a fini par sentir que notre amour pour elle n'avait pas diminué.
Mais la lecture... non, ça ne passait pas (ou presque) malgré mes ruses siouxes pour lui proposer différents moyens plus ou moins subtilement détournés ou mes tentatives de corruption avec des raisins secs. Rien à faire.
Nous avons décidé au printemps dernier
de laisser tomber, de ne faire aucun commentaire, aucune proposition et de s'y remettre à fond en septembre.
L'été passé, voici donc le moment de s'y mettre...
Il me semblait que
15 minutes de lecture par jour seraient à la fois supportables (pour elle... et pour moi ! car je savais que cela me demanderait un grand effort) et profitables pour relancer cet apprentissage. Je me suis préparée psychologiquement et j'ai annoncé la couleur : on lira pendant quinze minutes tous les matins (et quinze minutes efficaces ! sinon on prolonge), en commençant par cela, et tant pis si on ne fait que ça de la matinée !
Pendant un mois, il y a eu des larmes et des grincements de dents, des sourcils froncés, des moments d'agacement (voir de colère), des tentatives de négociation ("je lis ce mot et vous lisez les 3 suivants"... non ma chérie, moi je sais lire !). Mais j'étais décidée, il fallait l'aider à passer ce cap difficile.
Petit à petit, ce moment quotidien se faisait avec moins de protestations (un peu quand même, pour la forme).
Un jour, je lui ai tenu un grand discours sur la nécessité de lire, et l'encouragement à choisir d'utiliser son énergie pour avancer plutôt que de m'obliger à la traîner (désagréable pour elle comme pour moi)... qui l'a laissée de marbre.
Prise d'une inspiration divine (il fallait bien cela !), je me suis emparée de
notre cher minuteur et décrété : "Tu dois avoir fini ces 3 pages avant le minuteur. Si tu gagnes, tu as un
Bon Point. Tu s'assois et tu LIS ! ".
Pouf. Elle s'est exécutée. Youpi ! Ce fut à recommencer le lendemain, un peu plus facilement et de mieux en mieux.
Fin octobre, il y avait encore parfois quelques protestations pour la forme (chassez le naturel, il revient au galop), mais le principe des 15 minutes était acquis ! Elle avait même lu son premier vrai livre.
Le déclic final, comme je le vous racontais ici, a été des vacances passées avec une chère cousine, un peu plus âgée, qui lui ont fait goûter au plaisir de lire raconter des histoires aux autres.
On peut dire maintenant,
non seulement qu'elle sait lire, mais qu'elle aime lire. Un grand pas a été franchi.
Et quelle joie, pour nous parents, de l'entendre dire un soir à son Papa : "avant, je n'aimais pas lire, ça me fatiguait, mais je l'ai fait quand même et maintenant j'aime bien !".